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Covid-19, ou l’accélération de la santé connectée et ambiante !

14
avr
2020
Guillaume RIO
Responsable Technologies & Partenariats
9 minutes
La pandémie de Covid-19 a incité les chercheurs à explorer l’utilité des objets connectés dans la surveillance des maladies infectieuses. Lors d’une pandémie, les ressources de santé peuvent être facilement débordées, ce qui réduit l’efficacité et la qualité des soins. L’acquisition de Fitbit (montre connectée) et l’investissement dans la start-up finlandaise Oura (bague connectée), par Google et les recherches associées pour lutter contre le Covid-19 ont relancé les discussions sur le potentiel des objets connectés dans le secteur de la santé.

Le fait

Withings, société française qui conçoit des objets connectés (balances, tensiomètres, capteurs de sommeil, montres…) vient de lancer début 2020 la ‘ScanWatch’ soit une montre connectée capable de détecter :

  • la fibrillation auriculaire; 
  • le taux de saturation en oxygène dans le sang;
  • le rythme cardiaque irrégulier; 
  • la détection de l’apnée du sommeil.

Il suffit au patient d’installer l’application Health Mate qui analyse instantanément son rythme cardiaque et indique s’il semble normal ou s’il montre des signes de fibrillation auriculaire (FA). Si des signes de FA sont détectés, l’application recommande de contacter un médecin.

En cours de validation par les instances médicales la FDA (Food and Drug Administration) et l’EMA (European Médicines Evaluation Agency), cette montre pourrait être une alliée dans la lutte contre le Covid-19. Selon Eric Carreel, Fondateur de Withings, « Nous recevons de nombreuses demandes d’accompagnement des services hospitaliers, car la mesure du taux de saturation en oxygène via nos montres ScanWatch permet en effet d’aider au suivi de l’état de santé et du stress respiratoire des patients atteints de Covid-19, qui sont maintenus à domicile ».

Cette avancée française n’est pas la seule au monde, de nombreuses initiatives portant sur les objets connectés sont reconnus par le corps médical jour après jour.

L’IoT (Intelligence of things) va-t-il renforcer son action dans le domaine de la médecine connectée dite des «4P » (prédictive, préventive, personnalisée, participative) et introduire de nouveaux acteurs ?

Le décodage

Avec plus de 26 milliards d’objets connectés à travers le monde en 2019, l’Internet des objets bientôt boosté à la 5G n’a pas fini sa conquête. Elle participera grandement à la croissance du marché des soins de santé par l’IA qui devrait atteindre 6,6 milliards de dollars d’ici 2021 soit un taux de croissance annuel de 40 % selon Forester. 

L’autre grand facteur d’accélération est la législation, la FDA (Food and Drug Administration) et l’EMA (European Médicines Evaluation Agency) ont émis un standard sur la classification des objets de santé. Ce standard libère, de certaines contraintes légales, un grand nombre d’objets connectés. Il les rend ainsi plus actionnables dans le domaine de la santé.

Objets connectés : prévoyance et monitoring

Le Covid-19 va certainement accélérer la généralisation des wearables, les objets portables connectés, et en particulier ceux prônés par les géants du numérique. En effet, la pandémie de Covid-19 a incité les chercheurs à explorer l’utilité des objets connectés dans la surveillance des maladies infectieuses.

En janvier 2020, le Scripps Research Translational Institute (Institut de recherche médicale de San Diego) a annoncé qu’il avait construit un modèle pour suivre la grippe en surveillant en permanence des données comme le rythme cardiaque, la durée du sommeil et l’activité tracés par plus de 200 000 montres connectées Fitbit (racheté par Google en 2019) à travers les USA. 

Satisfait de ces résultats, Script a lancé un programme nommé ‘Detect (Digital Engagement & Tracking for Early Control & Treatment) soit une véritable étude sanitaire nationale pour détecter au plus vite les infections virales et en particulier le Covid-19. Cette étude sollicite la participation du grand public porteur de montres ou objets connectés mesurant le rythme cardiaque (comme l’Apple Watch, Fitbit, Garmin ou Oura, détenu en partie par Google) peut s’y joindre.

Ces derniers mesurant la température, la survenue de comportements liés à la fatigue, le rythme cardiaque, le rythme respiratoire ainsi que l’activité physique pourraient détecter les premiers symptômes de Covid-19 ! Une détection précoce du virus est, selon les médecins, la clé pour en contenir la propagation.

Pour améliorer ses performances à l’image de la ‘Scanwatch’ de Whiting, Apple vient d’ajouter, en mars 2020, une nouvelle fonction Sleeping BPM de Cardiogram dans l’Apple Watch. Selon Johnson Hsieh, co-fondateur de Cardiogram, elle aide les utilisateurs à mieux comprendre la réaction de leur corps aux symptômes de la grippe ou à d’autres maladies, y compris le COVID-19. Toutes ces données sont immédiatement partagées avec les instances médicales partenaires et sa propre clinique (AC Wellness) via sa plateforme ‘ResearchKit’.

Objets connectés : suivi et surveillance

À Hong Kong, des chercheurs se sont associés à la société Biofourmis pour utiliser son brassard connecté dans un programme de surveillance à distance des maladies impliquant 500 patients Covid-19.

Biofourmis rapporte que son brassard connecté, Everion, est capable de mesurer plus de 20 signaux physiologiques, dont l’oxygène du sang. Ces données, traitées par la plateforme analytique d’IA de l’entreprise, sont présentées aux cliniciens et aux patients pour les aider à surveiller la progression de la maladie et les alerter en cas de changements brusques. 

Le programme a trois objectifs principaux :

  1. Faciliter la surveillance à distance sans contact des patients infectés (ou suspectés d’être infectés) par le Covid-19.
  2. Fournir des interventions plus efficaces grâce à des analyses prédictives personnalisées.
  3. Aider les chercheurs à mieux comprendre la maladie elle-même.

Voice assistant et télémédecine

Aux USA, les détenteurs d’un Amazon Echo peuvent demander : « Alexa, que dois-je faire si je pense avoir contracté le coronavirus ? ». À partir de cette première question l’IA d’Alexa va l’interroger sur ses différents symptômes afin de lui prodiguer des conseils sur la base des informations officielles de la principale agence fédérale des États-Unis en matière de protection de la santé publique. Cependant ceci n’est que la partie émergée du potentiel de cet assistant vocal en termes de diagnostic de santé.

En 2019, Amazon a déposé un brevet concernant Alexa (son assistant vocal). Celui-ci permet de déterminer si l’utilisateur est malade en analysant sa voix et bientôt via la reconnaissance faciale. Il intègre aussi le lancement automatique d’une consultation médicale à distance, Amazon Care, encore réservé à ses employés à Seattle via l’assistant vocal. 

Derrière cet assistant vocal et grâce à la création de son cloud Comprehend Medical, Amazon est capable de traiter des millions de données non structurées destinées aux professionnels de santé (ordonnances, rapports de pathologie, transcriptions précises de consultations médicales entre patients et médecins, et passage de commande auprès de la pharmacie) et de définir un diagnostic personnalisé pour les patients. Entre temps, son cloud Comprehend Medical a été agréé par le HIPPA, l’équivalent américain du règlement général sur la protection des données (RGPD) pour les données médicales, ce qui fait d’Amazon un véritable acteur de la santé aux USA, d’autant plus qu’il y a plus de 45 millions d’assistants vocaux Alexa aux USA.

Objets connectés et génétique

Si pour le moment, Amazon Care (entité santé d’Amazon) travaille avec la Fondation Gates afin de distribuer des kits d’évaluation du Covid-19 à domicile, la véritable révolution à venir sera l’immixtion des tests génétiques et des appareils connectés.

La démocratisation des tests ADN et des séquenceurs ADN à bas coût (entre 100 et 150 euros) s’accélère à l’image de la société leader du marché 23andMe (appartenant à Google) qui incite les citoyens à gérer leur bien-être et leur santé au plus près.

Depuis fin 2019, Apple propose à ses employés des dépistages et des analyses ADN (avec son partenaire Color Genomics) dans ses différentes cliniques ‘AC Welness’. La future ambition est de fournir des conseils et traitements personnalisés au grand public en fonction de leur ADN et des autres données collectées et croisées en temps réel grâce aux appareils connectés (Apple Watch, Apple EarPods…). L’utilisateur pourra voir toutes ces données dans une interface simplifié et compréhensible.

 

Cette initiative a déjà été mise en place au Royaume-Uni dans le cadre du bien-être par la startup britannique DNA Nudge. Cette dernière propose une solution sous la forme d’un bracelet connecté. Le DnaBand, bracelet connecté, associe les données de santé qu’il capture avec les tests ADN. Un kit de test est fourni pour permettre à l’utilisateur de transmettre son génome au constructeur. Une fois le test effectué, les utilisateurs peuvent commencer à utiliser l’application pour smartphone, DnaNudge, ou porter le DnaBand au poignet pour scanner plus de 500 000 codes-barres de produits alimentaires et de boissons. Son objectif est d’évaluer l’adéquation des produits en fonction de leur profil génétique personnel.

L’objectif pour les géants du numérique sera de développer toute une série de capteurs toujours plus précis à travers leurs smart watch (Fitbit, Apple Watch), pour suivre la présence de certaines molécules dans le sang, et ainsi par exemple s’assurer qu’un utilisateur suit bien le traitement médical qui lui est prescrit.

En résumé, alors que le monde continue à compter sur les mesures classiques de santé publique pour lutter contre la pandémie de COVID-19, en 2020, il existe maintenant un large éventail de technologies connectées pour rejoindre ce combat. Nous allons rentrer dans l’univers de l’intelligence ambiante, où les objets communicants se coordonnent pour nous rendre service, nous faciliter la vie.

Face cette nouvelle crise planétaire que nous traversons, où l’état d’urgence est de mise et où la technologie est omnipotente, se posera alors des questions d’éthique et de privacy ! 

Il sera indispensable de mesurer avec recul et objectivité l’impact des nouvelles gouvernances. Car, celles-ci voudront imposer leurs modèles et leurs lois sous ouvert du bien commun. 

Guillaume RIO
Responsable Technologies & Partenariats
Spécialiste des écosystèmes BATX & GAFA et passionné par la Chine, Guillaume analyse l'impact des nouvelles technologies sur nos vies.
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