Comment la crise a impacté la vision de l’avenir des Français
DÉCODAGE CONSO
La désirabilité de l’avenir n’est pas une affaire de nouvelles technologies mais bien d’engagement humain.
S’appuyant sur sa plateforme de connaissance consommateurs, l’Access Panel 2020, et sur les 7 000 individus interrogés en France, avant la crise et au sortir de l’été, l’Echangeur BNP Paribas Personal Finance vous invite à découvrir comment les Français se saisissent de leur futur, quand la crise impacte leurs habitudes sans pour autant altérer leurs projections.
Des scénarios pour nous projeter
Avant la crise, l’Echangeur, en collaboration avec l’Observatoire Cetelem, avait initié une réflexion prospective et identifié 4 scénarios pour le futur. Face à un avenir multiple et en rupture, il est nécessaire d’ouvrir le champ de vision et de s’interroger sur la pérennité de ces scénarios, qui, in fine, sortent renforcés.
Soulignons que les axes de polarisation sont exacerbés par la crise.
De la marque unique à l’écosystème
Les marques et enseignes enrichissent leur présence auprès des consommateurs avec des propositions de valeurs de plus en plus personnalisées. Celles-ci contribuent à renforcer la conversation établie entre une marque et son client. Mobilisées pour participer à l’effort de guerre, à l’écoute de collaborateurs impactés, en quête de proximité client, les leaders du commerce ont toutes les raisons de renforcer leur territoire pendant la crise.
La diffusion des écosystèmes annoncée depuis une dizaine d’années par l’Echangeur marquera un virage dans l’existence des acteurs du commerce. Les marques et enseignes, de plus en plus fédérées pour servir nos usages, seront associées à de puissants écosystèmes ouverts à tous. Que ce soit sur le plan local ou pour lutter plus mondialement contre le Covid-19, les plateformes s’organisent et accélèrent leur maillage pendant la crise.
Du Consommateur accompagné au Consommateur engagé
Le consommateur apprécie l’accompagnement des marques et des enseignes capables d’aller au-devant de ses besoins et de lui faciliter la vie. La crise accélère la digitalisation en faveur d’une expérience client plus adaptée.
Le consommateur se mobilise sur l’objet de sa consommation et sur la portée de ses actes, tiraillé entre ses caprices et ses valeurs. La responsabilité de tous deviendra un enjeu au nom du collectif, voire de la survie. La mobilisation citoyenne s’accélère avec l’élan de solidarité porté par la crise.
4 scénarios probables du futur de la société française
Interrogés sur la probabilité des 4 scénarios pour l’avenir, les Français adhèrent aux différents modèles de société sur un taux de probabilité quasi identique. Entre octobre 2019 et septembre 2020, cette probabilité n’a pas évolué significativement.
Les scores moyens oscillent suivant les scénarios de 6 à 6,3 /10 : 6 pour le scénario Stars System, scénario d’une société du progrès individuel et 6,3 pour le scénario d’une société centrée sur le local, Made Locally. Si, globalement, on ne constate pas d’évolution significative des notes moyennes, on observe cependant une dépolarisation des notes, pour tous les scénarios, avec une progression des notes moyennes (5-6). Cela témoigne du fait que, pour les Français, le champ des possibles est ouvert.
Earth in Progress, Made Locally, des scénarios plébiscités pour l’avenir
Au-delà de la probabilité des scénarios pour le futur, il convient de s’interroger à la fois sur la perception des Français de leur situation actuelle et sur la désirabilité des différents scénarios.
La dimension locale apparaît comme la dimension privilégiée pour décrire la situation vécue aujourd’hui. Ajoutons que ce modèle talonne, en termes de désirabilité, le scénario d’une société engagée et participative, Earth in Progress.
A l’inverse, si les scénarios d’une société du progrès individuel ou celui d’une société technologique au service du collectif (Life Control) restent du domaine du probable, ils sont moins du domaine du perçu et certainement pas du domaine du désirable (avec un % très faible de Français les plébiscitant pour l’avenir).
Le triomphe du local, réponse la plus actuelle à la société d’aujourd’hui
Le modèle local prend davantage de place dans la société aujourd’hui, et passe en 1e position devant le modèle engagé et participatif, qui, lui, est en recul de 6 points, par rapport à octobre 2019 (25% des Français se reconnaissent aujourd’hui dans ce dernier modèle).
Le scénario Made Locally est particulièrement ressenti par les plus de 60 ans comme en prise avec leur situation actuelle (40% vs 31% pour la moyenne des Français). Cette tendance s’est renforcée depuis la crise, en lien avec leur plus forte propension à acheter chez les producteurs locaux alimentaires (52% d’entre eux, contre 41% des Français, chiffre en progression de 5 points depuis janvier 2020).
Soulignons que ce recentrage des seniors sur le localisme se produit au détriment du modèle engagé et participatif : 24% le mettent en avant, soit une baisse de – 13 points vs octobre 2019.
Désirabilité des scénarios : la crise n’a pas bouleversé les aspirations des Français
La désirabilité pour l’avenir se partage à la fois entre une société engagée et participative (39%) et une société centrée sur le local (37%).
Les Français restent méfiants à l’égard d’un modèle hyper technologique (que cela soit via une société technologique au service du collectif, ou via une société centrée sur le progrès individuel). Les nouvelles technologies représentent pour 55% d’entre eux un facteur de crainte. Ce sentiment de défiance est d’autant plus prégnant parmi ceux qui plébiscitent une société tournée vers le local (65% vs 55%).
Le modèle engagé et participatif est le scénario le plus souhaité par les jeunes et les seniors (41% d’entre eux), alors que les 30-59 ans lui préfèrent le modèle local (42% des 45 – 59 ans, soit le taux le plus élevé et 37% des 30 – 44 ans).
Les jeunes se distinguent par une plus faible propension à plébisciter une société centrée sur le local (28% d’entre eux vs 37% pour la moyenne des Français).
De manière relative car il n’est de loin pas leur scénario préféré, ils sont à l’inverse les plus séduits par une société technologique au service du collectif (19% d’entre eux vs 13% de la moyenne des Français plébiscitent le modèle). Ce résultat est à connecter avec leur plus grande aisance à l’égard des nouvelles technologies : 33% se déclarent très à l’aise vs 18% de la moyenne des Français.
Quand la mobilisation des citoyens est en jeu
Au-delà des modèles de société souhaités par les Français, afin de disposer d’éléments explicatifs, nous les avons également interrogés sur leur comportement de consommation vis-à-vis de l’environnement et des problématiques éthiques.
Si les Français restent sensibles à la défense de l’environnement, l’intégration de ces critères dans leur consommation est en perte de vitesse, sans nul doute devancés par le critère de prix. Les préoccupations liées à la crise sanitaire et économique prennent le pas sur toute autre considération.
A titre d’exemple, 39% des Français estiment que le respect de l’environnement représente leur premier critère de choix dans l’achat d’un produit (notes de 7 à 10, sur une échelle de 1 à 10). Ce taux est en recul de – 5 points par rapport à janvier 2020.
Notons que les jeunes demeurent les plus impliqués dans une consommation responsable :
- 56% des 18-29 ans sont prêts à boycotter les marques qui manquent d’éthique (conditions de travail, impact sur la santé, discrimination etc.), vs 51% pour la moyenne des Français – notes de 7 à 10
- 55% d’entre eux affirment qu’ils consomment moins pour préserver la planète, vs 43% des Français.
Cette sensibilité les conduit à plus d’exigence envers eux-mêmes : 56% d’entre eux considèrent ne pas faire tous les efforts pour une consommation respectueuse de l’environnement (vs 41% des Français), se heurtant sans doute à de nécessaires arbitrages budgétaires.
Le sentiment de responsabilité des citoyens de consommer différemment (afin de pousser les grandes marques à fabriquer et proposer des produits et services plus éco-responsables) domine et progresse depuis la crise : 54% des Français partagent cette opinion, soit une progression de + 7 points par rapport à octobre 2019.
Soulignons que cette posture est davantage impulsée par les seniors : 63% des plus de 60 ans.
A l’inverse, plus les Français sont jeunes, plus ils considèrent que les marques doivent jouer un rôle déterminant pour encourager les citoyens à consommer différemment (par exemple, 58% des moins de 30 ans attendent un engagement des grandes marques, vs 46% pour la moyenne des Français).
Les jeunes se distinguent également par des exigences supérieures à l’égard des gouvernements.
Pour 69 % des Français, l’impulsion écologique vient avant tout des citoyens et non des gouvernements. Ce résultat n’a pas évolué depuis le début de la crise. A contrario, même s’ils restent minoritaires, 41% des moins de 30 ans estiment que cette impulsion vient avant tout des autorités qui incitent par les lois les populations à changer profondément leurs comportements (vs 31% des Français).
A l’heure où l’écologie et le mieux vivre ensemble représentent les grands leviers de notre avenir, la mobilisation citoyenne est plébiscitée massivement par les Français. Elle témoigne du besoin de tous d’agir collectivement et individuellement au nom d’un projet de société vertueux.
La posture des jeunes est à étudier avec attention : s’ils apparaissent comme les plus impliqués concrètement dans une consommation responsable et s’ils mettent en avant l’engagement des citoyens pour faire pression sur les gouvernements et les obliger à réorienter leurs politiques environnementales, ils estiment que tout ne doit pas résider dans les mains des citoyens : les gouvernements comme les marques ont des rôles majeurs à jouer dont ils ne doivent pas se dédouaner.
