Comment la crise a impacté la digitalisation des Français ?
S’appuyant sur sa plateforme d’études, l’Access Panel 2020, L’Echangeur BNP Paribas Personal Finance analyse de plus près les arbitrages financiers et dynamiques de consommation des Français, Belges, Espagnols et Portugais.
Il vous propose des grilles de lecture, pour une utilisation opérationnelle.
L’Access Panel en images !
Comment la digitalisation s’est installée dans le quotidien des Français ?
La banalisation de la digitalisation n’est pas une affaire d’augmentation du nombre d’internautes ou de cyber-acheteurs. Perdure une France minoritaire qui ne pourra pas se saisir d’Internet, même à marche forcée.
Le taux de Français connectés au cours des 12 derniers mois est resté stable depuis la crise : il s’élève à 92% en octobre 2020, niveau déjà atteint il y a un an (source : Etude TGI Kantar menée auprès de 15000 personnes).
Le taux de cyber-acheteurs n’a, lui non plus, pas progressé entre janvier et septembre 2020 : 91% des Français connectés ont acheté sur Internet au cours des 12 derniers mois (vs 92% en janvier).
L’augmentation de la digitalisation est bien une affaire d’intensification de trafic, de multiplication des usages tous azimuts et de projection d’activité à la hausse.
La crise a engendré une augmentation notable de la fréquence d’achat : 71% des acheteurs online ont réalisé des achats sur Internet au moins une fois par mois, soit une progression de + 5 points par rapport à la vague de janvier. En termes de projection, 26% d’entre eux considèrent que la crise va les encourager durablement à augmenter leurs achats en ligne.
Au-delà du e-commerce, la digitalisation s’intensifie au cœur des foyers, ouvrant la porte à un grand nombre de propositions de valeurs, quand les foyers sont devenus de vrais « hub de services », en faveur du « Stay at home ».
Multiplication des usages digitaux tous azimuts
Des pratiques déjà bien installées se renforcent depuis la crise : à titre d’exemple, en septembre 2020, 50% des Français connectés déclarent utiliser un service de vidéo à la demande sachant que 1 sur 5 ont testé ces services pour la 1ère fois depuis la crise.
Le boom du gaming ne s’est par ailleurs pas démenti : 41% des Français déclarent jouer à des jeux vidéo en ligne et 7% ont découvert ce loisir depuis le 1er confinement. Cette tendance ouvre des perspectives pour les marques de créer des plateformes virtuelles d’échanges avec leurs consommateurs. Certaines se sont d’ailleurs déjà emparées de cette opportunité. Citons par exemple les initiatives de Gemo. L’enseigne a en effet lancé 2 animations : l’une autour d’Animal Crossing lors du 1er confinement ; l’autre, récemment autour de Mario Kart Live. Il s’agissait pour eux, évidemment, de garder le lien avec leurs consommateurs, alors que leurs magasins étaient obligés de rester fermés.
En parallèle, d’autres pratiques ont connu un boom spectaculaire, directement engendré par l’urgence de la crise sanitaire. Citons par exemple le recours à la télémédecine : 26% déclarent y recourir ; près des deux tiers d’entre eux ont franchi le pas, suite à la crise. Il en va de même pour le télétravail : 53% des actifs le pratiquent dont plus de la moitié l’ayant expérimenté avec la crise.
Une accélération de la digitalisation à 2 vitesses
Cette banalisation de l’usage du digital par les Français embarque de nouvelles cibles qui n’auraient jamais intégré autant le digital dans leur quotidien sans l’effet Covid.
Nouveaux adeptes du Drive et des services de livraison alimentaire à domicile, la part des 60 ans et plus ayant adopté ces services a plus que doublé entre janvier et septembre 2020 : 37% y ont eu recours au cours des 12 derniers mois (vs 15% lors de la vague de janvier).
Autre exemple emblématique, la télémédecine : si les hauts revenus sont les grands bénéficiaires de son essor, il a cependant touché toutes les catégories de revenus. 25% des bas revenus (- de 2 100 € nets mensuels par foyer) ont adopté ce nouveau service, dont près des deux tiers l’ont découvert avec la crise.
La première vague de confinement a finalement préparé les Français à intégrer de manière plus pérenne et surtout plus intense les nouveaux usages digitaux.
La multiplication des usages digitaux va s’ancrer dans le quotidien des Français de manière durable
Télétravail, télémédecine, VOD, jeux en ligne, réseaux sociaux…, les Français n’envisagent pas de retour en arrière possible : dans 7 à 9 cas sur 10, ils estiment qu’ils vont maintenir, voire augmenter leurs usages.
Pour autant, cet engouement ne profite qu’à une partie de la population plus à l’aise sur la prise en main du digital et son financement.
Si les deux tiers des 18 – 30 ans jouent à des jeux vidéo en ligne, les seniors, âgés de plus de 60 ans, restent peu enclins à pratiquer ce loisir, dont ils ne connaissent pas les codes (19%).
62% des hauts revenus (plus de 4 000€ nets mensuels par foyer) utilisent des services de vidéo à la demande contre 47% à 48% des catégories aux revenus bas ou moyens.
La télémédecine illustre une fracture territoriale : 39% des urbains (habitants des villes de plus de 100 000 habitants ou en agglomération parisienne) y ont recours, contre 18% des ruraux (moins de 2000 habitants).
Par ailleurs, on observe un recul du sentiment d’aisance avec les nouvelles technologies : 75% se déclarent à l’aise (en recul de 5 points, par rapport à la précédente mesure, datant d’octobre 2019). La baisse est particulièrement marquée parmi les seniors : 64% des plus de 60 ans se sentent à l’aise avec les nouvelles technologies, soit une baisse de -8 points.
Ce recul du sentiment d’aisance est certainement dû à une accélération forcée des usages digitaux, lors du 1er confinement notamment, et à des difficultés techniques rencontrées pour certains, seniors en tête.
Soulignons que ce manque d’agilité digitale des seniors peut représenter un obstacle particulièrement pesant pour cette catégorie de la population, encouragée à modifier en profondeur ses usages. Nous pourrions par exemple citer le cas de l’application Tous Anti Covid. Comment les seniors pourraient-ils l’utiliser massivement alors que nombre d’entre eux ne savent même pas comment installer une application sur leur smartphone, s’ils en ont un ?
Il convient donc d’être particulièrement attentif à la fois aux 13 millions de personnes touchées par l’illectronisme en France mais aussi à ceux qui n’auront ni les capacités ni même l’envie de s’embarquer dans l’hyper-digitalisation de leur quotidien. C’est d’ailleurs le message transmis par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique) à travers son étude « Perspectives de l’économie numérique de l’OCDE 2020« , fixant comme une urgence la lutte contre la fracture numérique.
